Jadis terrain de jeu privilégié des spéculateurs, le marché des montres d’occasion semble se trouver à la croisée des chemins. Après une période de grande croissance suivie d’une chute progressive des prix, le milieu de l’année 2025 marque une étape décisive. Certains symboles de prestige, autrefois inaccessibles, sont désormais disponibles à des prix bien moins élevés que le neuf. L’heure est venue de faire le point sur ce marché en pleine transformation.
Audemars Piguet : le recul d’un géant
Pour la première fois depuis 2022, certaines de ses montres, y compris des modèles phares, se négocient en dessous de leur prix de détail. Ce retournement de tendance est d’autant plus significatif qu’Audemars Piguet figurait parmi les marques dont les créations étaient systématiquement revendues avec une prime élevée sur le marché secondaire.
Deux gammes illustrent ce recul :
- Code 11.59, avec des montres désormais vendues 33 % sous leur prix catalogue, et une augmentation des remises de 21 % en un an.
- Royal Oak Offshore, dont le tarif de détail a chuté de 11 %, tout en s’échangeant aujourd’hui avec une décote de 23 %.
Des signes de tension sur le marché primaire
La baisse de valeur sur le marché secondaire reflète une pression croissante sur les ventes au détail. Richemont, Swatch Group et LVMH, maisons mères de nombreuses marques horlogères, sont directement concernées. L’augmentation de l’offre sur le secondaire, combinée à une baisse de désir des acheteurs, pourrait se traduire par un ralentissement des ventes neuves, voire une remise en question des tarifs.
Vue d’ensemble du marché secondaire au deuxième trimestre 2025
Un rapport conjoint de Morgan Stanley et WatchCharts permet de poser un diagnostic plus large sur ce que l’on peut observer actuellement :
- Rolex, Patek Philippe, Omega et Cartier : prix soit stabilisés, soit en légère hausse.
- Montres des marques Swatch Group : baisse moyenne de –5,8 % depuis le deuxième trimestre 2024.
- Marques Richemont et LVMH : recul de –8,9 % en un an.
- Entre le premier et le deuxième 2025 :–0,2 % pour Rolex,–1,1 % pour Swatch Group, –2,4 % pour Richemont, et –3,1 % pour LVMH.
En regardant ces données, on constate une stabilisation globale, avec toutefois des écarts significatifs entre certaines marques.
Trois ans de baisse continue
Le recul actuel ne date pas d’hier. Depuis le printemps 2022, les prix sur le marché secondaire n’ont cessé de baisser. Tandis que les modèles les plus échangés de Patek Philippe et Audemars Piguet ont vu leur valeur chuter de plus de 70 %, Rolex a enregistré une perte moyenne de 40 % sur ces trois dernières années.
La bonne nouvelle ? Le rythme de la baisse a fortement ralenti. Au deuxième trimestre 2025, la diminution n’était que de 0,3 % par rapport au trimestre précédent.
Une dynamique influencée par les taxes américaines
Aux États-Unis, l’instauration récente d’un droit de douane de 10 % sur les montres suisses complique encore le paysage. D’un côté, les prix neufs ont augmenté, de l’autre les prix d’occasion ont continué de baisser. En parallèle, les marges des revendeurs se sont effondrées. Beaucoup ont anticipé en gonflant leurs stocks avant l’entrée en vigueur des nouvelles règles, ce qui risque d’aggraver la pression à la baisse sur les prix jusqu’à la fin de l’année 2025.
En conclusion, disons que le marché secondaire des montres de luxe n’est plus l’eldorado spéculatif qu’il était jadis. La mi‑2025 signe un tournant où certains noms naguère intouchables, voient leur aura ébranlée. Face à une concentration du marché autour de quelques marques fortes et à une surabondance d’offres sur d’autres segments, les acheteurs ont aujourd’hui l’avantage. Pour les passionnés, c’est le moment idéal pour acquérir des pièces emblématiques à des prix plus accessibles. À condition, bien sûr, de bien choisir où investir.
Source : Les données chiffrées de cet article sont issues d’un article de WatchPro : « Secondary market prices for Audemars Piguet drop below retail for first time since 2022 », publié en juillet 2025.
« La bonne nouvelle ? Le rythme de la baisse a fortement ralenti. »
Pour moi consommateur, je ne vois pas ça comme une bonne nouvelle 🙂